de 1875 à 2017
M. DELAYAT
Récits n°8
Écoutez le témoignage de M. DELAYAT
Quand j'étais gamin, le Fort était l'endroit interdit. Il fallait donc tout le temps y aller ! La parcelle entière était interdite, on habitait juste à côté. On jouait dans les champs, on était tout le temps dehors, alors on jouait tout le temps dans ce bois. Mais Monsieur Lacroix était gentil, il nous laissait jouer. Mais bon, quand on le voyait arriver avec les chiens, bon, heureusement qu'il les maîtrisait. Il devait en avoir 7, 8, il sortait la meute. Il nous faisait la morale et puis on filait. Toute la parcelle était barbelée. Il y avait carrément des chemins dans le bois et que les gens empruntaient souvent.
Dans le Fort, je n'y suis rentré qu'une fois. Avec mon frère, on était rentrés de l'autre côté. Avec une corde. On s'était retrouvés dans les croisements qui allaient aux caponnières. Ce n'était qu'un croisement, mais pour nous c'était déjà un labyrinthe. Soudain, on a entendu un chien. On était tous les deux collés contre le mur. Le chien ne passait pas loin de nous. J'ai pas demandé mon reste et je suis parti en courant, remonté le mur… sauvé ! C'était la trouille. J'avais vraiment eu trop peur. Quand on arrivait devant l'entrée du Fort... on rampait pour ne pas se faire voir, et puis on voyait cette paille au fond du pavillon, on pensait que s'il nous chopait il nous mettrait en prison-là bas en bas. Il y avait encore une guérite à l'époque sur le pont.
Mais c'était notre terrain de jeu. Le bois surtout, on grimpait aux arbres, on faisait nos cabanes. D'un autre côté, il n'était pas tous les jours gardé, surveillé ce bois. On avait l'habitude de couper par le bois pour rejoindre la Bégude aux Géraniums.
Gamin, on ne voyait pas de militaires. Mais quand ils ont réhabilité le Fort en 80, là oui. On voyait passer les camions, et puis ils faisaient leur entraînement. On les entendait tirer. On retrouve pas mal des balles à blancs, des grenades de plâtre. Les militaires n'ont pas l'habitude d'être radins là-dessus. Je m'en rappelle, qu'est-ce qu'on pouvait gaspiller !
Mais il n'y avait pas de contact dans la ville. Ce n'était pas une ville-caserne, comme il y a des endroits. Tu vas à Metz, à Pau, il y a des militaires partout dans la ville, tandis que là, non, ils ne faisaient que passer.
Quand ils ont réhabilité le Fort, en 80, ils ont nettoyé les fossés, ils avaient fait un sentier sportif à la place de l'actuel sentier botanique. Ils avaient nettoyé la prairie là où on a fait nos murets.
Mais c'est vrai que de travailler dans ce cadre c'est formidable. Même quand il y a du brouillard, on sait qu'on est dans un lieu magnifique. Et puis on fait quand même un travail qui va perdurer pour les générations futures. C'est pour cela que je m'implique beaucoup dans le « Fort en bal[l]ade » et les « Journées du Patrimoine », car cela fait connaître aux gens. Cela me plaît beaucoup de pouvoir raconter au gens cette histoire et de meubler avec quelques anecdotes, ayant vécu toujours à côté de ce Fort.